- Langage oral et communication -
- Troubles neurodéveloppementaux
Créer les conditions favorables à un développement langagier précoce robuste pour tous : Partie 2. Mise en place d’un cadre de santé publique fondé sur les preuves
L'émergence du langage chez l'enfant est une réalisation clé du développement humain. Bien que ce processus soit généralement fluide, certains enfants rencontrent des obstacles, notamment ceux issus de milieux défavorisés. Il reste crucial d'identifier précocement les enfants à risque de développer un TDL, mais le processus reste complexe. La partie 1 de l’article référent, résumé sur la Happyneuron Academy, explorait les facteurs influençant le développement langagier et proposait un système de surveillance équitable. Cette seconde partie propose la conception d’un cadre de santé publique basé sur des preuves, combinant diverses interventions pour traiter les inégalités linguistiques en croisant données, théories et pratiques d'intervention. Il convient toutefois de préciser que les propositions exposées dans cet article sont réalisées en référence au système de santé anglo-saxon. Toutefois, des transpositions au système de santé français sont envisageables.
Publication d'origine : McKean, C., & Reilly, S. (2023). Creating the conditions for robust early language development for all: Part two: Evidence informed public health framework for child language in the early years. International Journal of Language & Communication Disorders, 58(6), 2242-2264.
D'où vient cet article ?
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Introduction
Le trouble développemental du langage (TDL) et les inégalités socioéconomiques
Les conditions socioéconomiques (CSE) influencent le développement linguistique des enfants, bien que le TDL ne soit pas directement causé par ces conditions. Il résulte d'une interaction entre les capacités biologiques de l'enfant et son environnement. Les enfants ayant des difficultés d'apprentissage linguistique nécessitent un environnement plus riche que ceux présentant des prédispositions biologiques ( plus de répétitions, plus de réactivité, plus de cohérence), une exigence difficile à satisfaire pour les familles défavorisées. Ces familles, souvent confrontées à l'insécurité financière et à l'insécurité du logement, au manque de temps à des moments clés du quotidien, ou à des fratries nombreuses, peinent à offrir des interactions qualitatives, aggravant ainsi les inégalités (Gray, 2003; Levickis et al., 2014, 2018, 2023).
Malgré une reconnaissance de ces inégalités dans le domaine de la santé, les interventions publiques restent souvent insuffisantes, pouvant même les aggraver. Seuls 50 % des enfants de moins de 5 ans avec des compétences linguistiques faibles reçoivent l’aide adéquate, situation exacerbée par la pauvreté (Skeat et al., 2010; Norbury et al., 2016). Les familles défavorisées se heurtent à des services de soutien fragmentés et complexes, imposant aux parents la charge de coordonner les soins (Axford et al., 2015). Les interventions ciblant les interactions parentales sont cruciales, mais ces efforts sont plus difficiles pour les familles en difficulté, créant un fossé entre les enfants avantagés et les autres (Tracey et al., 2022).
Un cadre de santé publique pour les interventions préventives
Le TDL, répondant aux critères d'un problème de santé publique, nécessite des interventions adaptées (Law et al., 2013). La santé publique englobe un large éventail de services et systèmes nécessitant une coordination pour être efficace.
La prévention en santé publique se décline en trois niveaux : primaire, secondaire et tertiaire. La prévention primaire vise à réduire l'incidence d'une maladie au sein de la population générale, la prévention secondaire cible des sous-groupes à risque, et la prévention tertiaire cherche à atténuer les conséquences des maladies chroniques.
Un cadre de santé publique pour garantir un développement langagier précoce dans la petite enfance
Le développement du langage dans la petite enfance est essentiel pour la santé, l'éducation, l'emploi et le bien-être futurs. Des interventions précoces sont cruciales pour maximiser l'efficacité de ce développement. Un cadre de santé publique doit garantir que ces interventions bénéficient équitablement à tous les enfants et abordent les causes sous-jacentes des troubles linguistiques.
L’article référent propose un cadre de santé publique dédié à l'intervention précoce sur le développement langagier de l'enfant, en détaillant :
- ses composantes essentielles,
- les interventions préventives fondées sur des preuves,
- les qualités cruciales pour une mise en œuvre réussie.
Les composantes de ce cadre de santé publique
Afin de garantir des résultats optimaux chez les enfants de 0 à 4 ans, une approche intégrée combinant des interventions à tous les niveaux de prévention est nécessaire. Chaque type de prévention, isolément, ne suffit pas : les interventions universelles risquent d’accentuer les inégalités en ne touchant que ceux disposant des ressources les plus importantes, les interventions sélectives peuvent mal évaluer les besoins et mal identifier les individus exprimant des besoins, et, de la même façon, les interventions ciblées peuvent sous-identifier des enfants en difficulté en raison de l’instabilité du développement langagier (cf : voir article concernant la partie 1 sur la Happyneuron Academy). Les interventions tertiaires, bien que cruciales, risquent de ne pas corriger ces inégalités et de manquer l'opportunité d'agir en amont des difficultés langagières.
Une mosaïque d'interventions préventives et de surveillance du développement
Ce cadre de santé publique doit proposer une approche globale pour tous les enfants de 0 à 4 ans incluant une prévention primaire qui sensibilise les parents à l'importance du développement linguistique et son soutien au quotidien, appuyée par une surveillance régulière à des étapes clés de la petite enfance (12 mois, 24-30 mois, 3 et 4 ans). Cela passe par des campagnes d'information massives et un suivi des trajectoires linguistiques par différents professionnels de santé.
La prévention secondaire doit cibler les enfants socialement défavorisés. Elle nécessite une formation continue des équipes ainsi qu’un soutien financier stable. L'analyse des données locales doit être au cœur du projet permettant ainsi de mieux allouer les ressources là où les risques sont concentrés, d’anticiper les difficultés et de cibler les services à proposer à la lumières de ces données.
Enfin, la prévention tertiaire doit s'adresser aux enfants présen…
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